La
salariée d’une crèche de la région parisienne ( BABYLOUP) est
licenciée parce qu’elle se refuse à ôter son voile pendant les
heures de service. Ayant vainement épuisé tous les recours en
France, elle soumet son cas aux experts du comité des droits de
l’Homme des Nations unies.
Des
femmes verbalisées en France pour le port du voile intégral en
violation de la loi française font de même. Dans tous les cas, le
comité des droits de l’Homme des Nations unies demande à la
France à laquelle ils donnent tort de revoir sa position.
Disons
le d’emblée, il ne nous semble pas, bien au contraire, que le
contrôle par un groupe d’experts indépendants de l’application
des textes internationaux de protection des droits de l’Homme
puisse être critiqué. En matière de droit fondamentaux, nous ne
jugeons pas défendable un souverainisme en cette matière (pour le
souverainisme en général, c’est totalement extérieur à l’objet
statutaire de notre association).
En
revanche, nous pouvons nous interroger sur cette incompréhension par
nombreux d’experts internationaux, parfois hors de l’enceinte de
ce comité des droits de l’homme, de la conception française de la
laïcité.
La
conception française, à laquelle nous nous rattachons, accorde une
grande importance à l’individu. Serait-ce à dire que les
communautés à l’intérieur de la nation n'existeraient pas? Sans
doute pas, mais cela signifie quand même que la liberté
individuelle de conscience revêt une grande importance, ne
figure-t-elle pas comme des principes directeurs de la loi de 1905,
dès son article 1 ? L’une des particularités du droit français
est précisément la recherche d’un équilibre entre les droits de
l’individu et ceux des communautés. Ce n’est pas le cas partout,
même en Europe.Est-ce à-dire qu’il faille clouer au pilori les
autres régimes juridiques en Europe dans le monde ? Sans doute pas,
mais, si nous voulons que notre régime de laïcité soit compris et
adopté, nous pensons nécessaire de redoubler d’efforts pour
discuter et persuader.
Pour
revenir aux Nations unies, un rapporteur spécial sur l’intolérance
religieuse, Monsieur Amor, émettait des réserves sur les politiques
de lutte contre le sectarisme, et craignait un réveil de
l’intolérance religieuse. Une des femmes lui ayant succédé à ce
poste, Madame Asma Jahangir, dans un de ses rapports, critiquait
explicitement l’attitude française, considérant les membres de
sectes en France comme des victimes de discrimination. Le Cercle
laïque pour la prévention du sectarisme (CLPS) avait exprimé son
désaccord avec elle, mais aussi du respect: après avoir quitté son
poste à l’ONU, elle était revenue au Pakistan où elle avait été
assignée à résidence car elle était depuis son plus jeune âge
une militante des droits de l’Homme. Elle avait été
vice-présidente de la fédération internationale des droits de
l’Homme.
Lorsqu’elle
était assignée à résidence, le CLPS avait exprimé le souhait
qu’elle soit libérée, tout en déplorant et en s’interrogeant
sur l’incompréhension entre des militants si courageux par
ailleurs et nous, laïques français, tellement préoccupés par la
défense de ces droits. Aussi nous ne sommes pas étonnés par les
récents avis du comité des droits de l’Homme des Nations unies.
Devant
le comité des droits de l’homme des Nations unies, la France avait
fait valoir l’importance du visage découvert qui favorise la
communication et le vivre ensemble. Pouvons-nous nous permettre
d’émettre une opinion ? Est-ce que la dissimulation totale de
l’individu et notamment du visage ne serait pas une source de
dépersonnalisation qui irait à l’encontre du principe de dignité
humaine ? Un principe que toutes les juridictions admettent pour
fonder une décision en droit. Observons quand même que nous ne
prenons nullement ce parti pour des raisons liées à la religion,
chacun restant totalement libre de croire ou de ne pas croire, mais
uniquement pour des raisons liées au respect de la personne. Surtout
que notre lecteur ne se méprenne pas : jamais nous ne nous nous
référerons à une laïcité teintée d’hostilité à la religion
musulmane à à l’instar d’un journal en ligne prétendument
laïque mais dont l’hostilité viscérale à l’Islam ne peut même
plus dissimuler une xénophobie exacerbée.Cependant concluons sur
une note d’optimisme : récemment, en janvier 2018, la rapporteuse
spéciale de l'ONU dans le domaine des droits culturels affirmait :
«les initiatives culturelles et artistiques peuvent aussi défendre
les valeurs de diversité, de laïcité, d’inclusion, de tolérance,
d’égalité des sexes, de droits de l’homme et de paix par les
thèmes qu’elle choisissent d’aborder».
Pour
persuader les acteurs publics du niveau le plus local ou niveau
international de la pertinence de notre conception de la laïcité,
pour les persuader aussi de la même pertinence dans notre action de
prévention du sectarisme, les deux étant étroitement liées pour
nous, il nous faudra faire preuve de patience et de persuasion;
sûrement pas d’agressivité ni d’arrogance et encore moins de la
certitude d’incarner la lutte du bien contre le mal.
Pour
plus d’informations, le blog du CLPS,
http://actu-sectarisme.blogspot.com